Orientalismes

La Galerie des Beaux-arts de Bordeaux propose jusqu’au 23 juin une exposition intitulée « Orientalismes ».

 Le principe des expositions à la Galerie des Beaux-arts de Bordeaux est de donner à voir des œuvres appartenant au fonds du Musée des Beaux-arts mais non présentées dans la collection permanente. Cette fois, le thème fédérateur est « l’orientalisme », ou plutôt les orientalismes au sens de l’influence du monde musulman proche (Maghreb, Machrek et Turquie) sur les peintres français du 18ième aux 20ièmes siècles. L’inconvénient de cette méthode, c’est que les œuvres présentées sont souvent de second plan ; son intérêt consiste à exposer des œuvres d’époques différentes mais se rapportant à un sujet commun.

Pierre Roblin, un vendredi, jour des femmes au cimetière arabe, Alger
Pierre Roblin, un vendredi, jour des femmes au cimetière arabe, Alger

« Orientalismes » témoigne de l’évolution du regard des occidentaux sur le monde musulman. Au dix-huitième siècle, ce regard est extérieur, avide d’exotisme : l’exposition commence par une Nativité, avec des rois mages venus de l’orient tel qu’on le rêve ; un tableau de Jean-Baptiste Van Mour représente la réception d’un ambassadeur français par le Sultan de Constantinople en 1724. Un siècle plus tard, Eugène Delacroix effectue un voyage en Afrique du Nord (1832) qui inspire de nombreux tableaux.

 Après la colonisation du Maghreb, les peintres ont un regard plus proche, plus intérieur du monde musulman. Certes, ils restent fascinés par la différence : la très belle toile de Pierre Roblin qui sert d’affiche à l’exposition montre des femmes algéroises au cimetière arabe un vendredi, au début du vingtième siècle ; un tableau en grand format de Jean Joseph Benjamin-Constant intitulée « prisonniers marocains » (1875) exprime la violence des rapports sociaux. Peu à peu, toutefois, la différence et l’exotisme se diluent, et reste seulement l’intérêt pour des paysages baignés de lumière (par exemple le port d’Alger peint par Albert Marquet pendant la seconde guerre mondiale, quand il était réfugié dans cette ville) ou pour des personnes considérées pour elles-mêmes et non comme archétypes d’une société étrangère.

 J’ai aimé dans l’exposition l’œuvre de Jean Launois (1898 – 1942), en particulier plusieurs toiles représentant des femmes du quartier mal famé de la Casbah. « L’orientalisme » y est discrètement présent dans les vêtements et les traits des personnages ; mais c’est le regard compassionnel sur la condition humaine qui domine. J’ai retrouvé dans ses œuvres l’émotion que m’avaient procurée les aquarelles du peintre anglais Edward Burra (1905 – 1976).

Une œuvre de Jean Launois
Une œuvre de Jean Launois

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