« Polina, danser sa vie », film de Valérie Müller et Angelin Preljocaj, constitue un bel hommage à la danse contemporaine.
Polina (Anastasia Shevtsova) fait de la danse depuis sa tendre enfance. Elle a appris la danse classique dans toute sa rigueur sous la férule d’un maître intraitable, Bojinski (Aleksei Guskov). Ses parents, pauvres, se sont saignés pour qu’un jour elle devienne danseuse étoile. Son père est allé jusqu’à travailler, à ses risques et périls, pour le compte d’une mafia.
Voici qu’une fois chèrement acquise son admission à l’école du Bolchoï, Polina est fascinée par un spectacle de danse contemporaine. Elle renonce à la belle carrière qui s’annonce pour elle à Moscou et part à l’aventure avec Adrien (Niels Schneider), le compagnon français dont elle est tombée amoureuse.
À Aix en Provence, elle est acceptée comme stagiaire par la chorégraphe Liria Elsey (Juliette Binoche) qui l’initie à une danse solidement enracinée sur le sol, une danse inspirée par les mouvements des corps dans la vraie vie. Une fracture de la cheville, la fracture de sa relation amoureuse avec Adrien rejettent Polina sur les routes. À Anvers, l’une des capitales européennes de la danse moderne, elle ne trouve pas d’emploi comme danseuse, frôle le statut de SDF et finit par se faire embaucher comme serveuse dans un bar.
Liria lui a conseillé de s’imprégner de la vraie vie. Elle est au fond du trou, privée du métier de danseuse pour lequel elle a tout sacrifié. Mais parmi les clients du bar, elle voit les corps s’effleurer, s’éviter, se toucher. Dans le métro, un couple mène sans le savoir une danse de séduction.
Polina fait la connaissance de Karl (Jérémie Bélingard), un animateur qui propose de l’expression corporelle à des jeunes de la banlieue. Il va être l’instrument de la résurrection artistique de Polina. Celle-ci a accumulé dans sa traversée du désert un trésor d’expériences humaines qu’elle traduit en gestes et en mouvements. En Karl, elle a le partenaire amoureux et artistique dont elle avait besoin. Elle est mûre pour monter son premier spectacle chorégraphique.
Le film d’Angelin Preljocaj et Valérie Müller fait naturellement penser à « Billie Elliott », cette histoire d’un garçon de la classe ouvrière anglaise qui, malgré les sarcasmes, se passionne pour le ballet et devient danseur étoile. L’intrigue est moins bien ficelée. Mais ce qui fait la force de « Polina », c’est la présence de la musique et de la danse d’un bout à l’autre.
J’ai été envoûté par ce film. Je suis sensibilisé au thème du vieillissement, à la rigidification du corps, à la perte de mobilité. J’admire et j’envie ces danseurs qui, à force de travail, parviennent à donner l’illusion qu’ils échappent à la pesanteur. Je suis fasciné par la grâce de leurs mouvements. Je trouve aussi remarquable l’effort des chorégraphes pour extrapoler les gestes de nos vies quotidiennes pour nous offrir un moment de grâce.
« Polina, danser sa vie » est l’un des rares films qu’on a envie de revoir dès le générique de fin.