Sortir des allocations

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 John Bird, l’homme d’affaires qui a créé « The Big Issue », le journal britannique vendu par des sans-abris, vient de s’adresser au nouveau Premier Ministre David Cameron en lui demandant de conditionner l’octroi d’allocations à un véritable travail d’intérêt social. Il l’a dit à Margarette Driscoll, journaliste au Sunday Times (20 juin 2010). Voici une traduction d’une partie de l’article.

Il y a trois ans, j’ai rencontré une femme du nom d’Angela. Elle avait 54 ans et au long de la plus grande partie de sa vie elle avait été une perdante, une mère célibataire qui avait élevé deux fils dans l’une des cités les plus dures du sud-est de Londres. Elle avait survécu à deux relations de couple oppressantes et vécu la majeure partie de sa vie adultes sur des allocations.

A mesure que les enfants d’Angela grandissaient, elle voyait de jeunes mères de la cité traverser les mêmes épreuves que les siennes et elle voulait les aider. Elle commença a donner des avis et un soutien informels, puis elle se mit à faire du bénévolat dans un centre d’accueil pour jeunes mères et impressionna tout le monde à tel point par sa compassion et son bon sens que l’autorité locale lui offrit un travail, s’occuper des personnes âgées.

A l’époque où je l’ai rencontrée, Angela travaillait depuis un an. Elle avait les larmes aux yeux lorsqu’elle me disait ce que cela avait signifié pour elle : pendant des années, elle avait eu l’impression que la Sécurité Sociale la considérait de haut, la traitait comme un numéro et non comme une personne, quelqu’un qui n’avait rien à offrir et dont on n’attendait rien.

Angela devint l’aiguillon pour un livre sur lequel j’ai travaillé depuis lors, Le Manuel de la Sortie des Allocations, qui s’intéresse à comment des personnes ayant vécu pendant longtemps sur des allocations sont sortis de la sécurité sociale et se sont mis au travail.

Le fil semble être le bénévolat, se mettre en avant, s’impliquer. Mais la plupart des gens ne savent pas comment le faire. Alors ils moisissent devant la télé et restent collés aux allocations. Les Pôles Emploi deviennent simplement un endroit où l’on remplit des imprimés – il n’y a pas d’encouragement ou d’obligation à s’éduquer, à aider la société, il n’y a pas de contrat entre le bénéficiaire des allocations et nous, les gens qui payons les impôts (…)

J’ai rappelé à David Cameron que nous avons les pauvres les plus chers au monde. L’argent que les nantis placent sur leurs enfants fait pâle figure à côté du coût de s’occuper des enfants les plus pauvres (…) Il coûte à la société trois fois plus cher de produire un de nos vendeurs de The Big Issue  qu’il aurait coûté à leurs parents de les placer à Eton (école privée fréquentée par la haute bourgeoisie). Quelque 80% des vendeurs de The Big Issue sont sortis d’une structure sociale qui co3te 2000 sterlings par semaine. Cela fait 100.000 sterlings par semaine, et si les enfants sont dans une structure pendant 210 ans, cela fait 1 million de sterlings par tête. Et ils sortent de ces structures coûteuses avec peu d’éducation et pas d’avenir.

Nous avons ainsi rendu possible qu’eux, et des milliers d’autres issus de la pauvreté, vivent d’allocations. Cela n’abîme pas seulement les individus, cela abîme la société. L’industrie des drogues illégales serait perdue sans le soutien de l’état providence. L’industrie des boissons et les fast-foods comme Mc Donald seraient sérieusement frappés si les sterlings du gouvernement n’étaient pas placés dans leurs caisses par les bénéficiaires des allocations. Et les structures gouvernementales qui, à mauvais escient, rendent la vie plus facile pour les pauvres enracinent la pauvreté, l’exclusion et le désespoir (…)

Il faudrait dire à quiconque entre dans le système des allocations que c’est sur la base d’un programme à durée limitée et que, pendant qu’ils cherchent du travail, on attend d’eux qu’ils fassent du bien socialement en échange de leur argent.

Regardez aux lacunes de notre société ; le soin aux personnes âgées, la propreté de nos villes. L’une et l’autre fonction pourraient être assumées par beaucoup de personnes qui sont hors du travail. Si elles refusent d’en faire partie, il pourrait exister des sanctions, mais je crois qu’une fois arrivées là, acquérir des compétences et prendre part à une équipe donnerait à des gens qui sont autrement oubliés la confiance qui leur permettra de retrouver du travail. Angela le fit toute seule pour son compte. Aidons des milliers d’autres à faire de même.

Photo : John Bird.

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