HistoireSociétéTélévision25 août 20240Surf, le feu sacré

France TV propose en replay « Surf, le feu sacré », documentaire de Benjamin Morel et Christophe Bouquet.

Le feu sacré, c’est dans la langue polynésienne de Tahiti, le « mana », l’énergie spirituelle qui anime l’océan et dont l’immense vague Teahupo’o, à Tahiti constitue la plus impressionnante manifestation. C’est à Tahiti qu’ont été organisées les épreuves olympiques de surf en juillet 2024.

Le surf est donc une discipline olympique, jugée selon des méthodes voisines du patinage artistique. C’est aussi une activité de loisir pratiquée par des millions de personnes dans le monde. Pourtant, alors qu’elle appartenait à la culture polynésienne depuis des siècles, elle a failli disparaître.

Le peuple polynésien est parfois appelé « peuple de l’océan », le seul peuple de la terre sachant marcher sur l’eau. Ses origines remontent à environ 6 000 ans, lorsque des habitants du sud de la Chine ont pris la mer. Par migrations successives, au fil des millénaires, ils ont abordé les Philippines et l’Indonésie, Tahiti et Hawaï, jusqu’à l’Ile de Pâques et, en 1280, la Nouvelle Zélande. C’est un peuple du continent liquide, toujours en mouvement.

Glisser sur les vagues – on pourrai justement dire aussi danser sur les vagues – constitue une pure expression de la culture de ce peuple. À Tahiti, les tournois de surf opposant les nobles jouaient le même rôle que les joutes de la chevalerie en occident. Lorsque les missionnaires catholiques et protestants arrivèrent au dix-neuvième siècle, nudité et oisiveté leur parurent des vices à éradiquer. Il fallait vêtir les indigènes et les mettre au travail.

C’est un homme de Hawaï qui évita l’extinction du surf : Duke Kahanamokou. Né en 1890 dans cette île annexée par les États-Unis, il pulvérisa des records du monde de natation et son immense popularité rejaillit sur le surf. Dans les années 1920, l’Américain Tom Blake, devenu ami de Duke, popularisa ce sport par son livre « Hawaian surfboard » et apporta à la planche de surf une invention décisive, la dérive, permettant de glisser parallèlement à la vague.

Tom Blake et Duke Kahanamokou

Le documentaire de Morel et Bouquet retrace les étapes d’un formidable développement : les progrès techniques (le polystyrène, les planches plus légères et plus courtes, les trois dérives) ; le passage d’une contreculture californienne fortement marquée par l’usage des drogues au tourisme de masse ; l’émergence d’un style de vie incarné par des marques comme Rip Curl ou Quiksilver ; l’apparition du surf de hautes vagues, rendu possible par l’utilisation de jet skis amenant les athlètes au sommet de montagnes liquides.

Professionnels ou pratiquants amateurs, les passionnés du surf reconnaissent dans cette activité une dimension spirituelle, renouant ainsi avec la culture polynésienne traditionnelle. Le surf est une forme de danse sacrée (« le feu sacré », le mana), dans laquelle le danseur doit être fort, pour résister à la pression de la vague, et souple, pour onduler.  Le surfeur est confronté à la complexité du monde, à cet univers liquide en mouvement circulaire dont il s’efforce de comprendre les règles. Il est chasseur de vagues, vif comme un chat guettant sa proie. Devant la vague, il est seul face à son destin : on y va ! parfois au risque de sa vie.

« Surf, le feu sacré » offre au spectateur des images éblouissantes, mais lui propose surtout une réflexion sur une discipline qui a trouvé sa place parmi les sports olympiques, et trouve ses racines dans une culture très ancienne.

La surfeuse de grosses vagues Vahiné Fierro

Commenter cet article

Votre email ne sera pas publié.