Dans son essai « quelle terreur en nous ne veut pas finir ? », Frédéric Boyer interroge notre aveuglement féroce et barbare à l’égard des immigrants.
Quels sentiments dominent en nous lorsque les médias mettent sous nos yeux l’odyssée des migrants qui tentent de franchir la Méditerranée au péril de leur vie pour joindre l’eldorado européen ? Un peu de pitié, c’est certain. Mais aussi du fatalisme : les vagues d’immigrants seraient aussi nuisibles et inévitables que les inondations et les tsunamis. De la lassitude et de la lâcheté : nous sommes saturés d’images de malheur, nous ne voulons plus les voir. Et aussi de la peur : nous craignons que les nouveaux venus nous submergent, prennent nos emplois, mettent nos systèmes sociaux en faillite, voire nous remplacent dans notre propre pays. Continuer la lecture de « Quelle terreur en nous ne veut pas finir ? »
La conduite des taxis collectifs tunisiens, voitures de louage dans le jargon local, relève davantage de la Formule 1 que du transport en commun.
Le louage est une institution tunisienne qui marche bien. Pour se déplacer d’une ville à l’autre, on se rend à une station de louage où sont stationnées des dizaines de minibus d’une capacité de 8 passagers. On prend son ticket (il en coûte 5€ pour parcourir les 160km entre Tunis et Kairouan, par exemple). On monte dans un minibus. Lorsqu’il est plein, il démarre. Continuer la lecture de « Pilotes de louage »
L’interminable crise de la zone euro ne cacherait-elle pas une crise plus grave, celle d’une récession de l’économie américaine causée par « the fiscal cliff », la « falaise fiscale » ?
L’expression « falaise fiscale » a été popularisée par le Gouverneur de la Réserve Fédérale américaine, Ben Bernanke. Elle désigne le risque de massives augmentations d’impôts et de réductions de la dépense publique dès janvier 2013 si Démocrates et Républicains ne trouvent pas d’ici là un terrain d’entente. Du côté impôts, les mesures d’allègement de l’ère Bush, principalement généreuses pour les grandes fortunes, arrivent à expiration au 31 décembre ; et la correction du barème de l’impôt en fonction de l’inflation n’a pas encore été votée. Du côté des dépenses, un programme d’urgence d’indemnisation du chômage arrive lui aussi à son terme, et l’habituelle subvention d’équilibre permettant de payer les médecins des programmes Medicare et Medicaid n’a pas été votée.
Mais il y a plus. Aux termes d’un accord d’août 2011 entre le président Obama et la majorité républicaine à la chambre des représentants, sitôt qu’un seuil d’endettement public sera atteint, les dépenses seront automatiquement réduites et les impôts automatiquement augmentés. Or, selon de patron d’UPS Scott Davis, l’endettement public américain s’accroit de 3 millions de dollars par minute. Le plafond d’endettement sera atteint en janvier.
Le non renouvellement des mesures fiscales arrivant à échéance et l’application de réductions automatiques opèreraient sur l’économie américaine un prélèvement supérieur à 500 milliards de dollars, soit 3 à 4% du produit national brut. Une grave récession pourrait s’ensuivre, qui rejaillirait presque immédiatement sur les autres grandes économies européennes et asiatiques. Certains économistes disent que l’expression « falaise fiscale » est faible et qu’il vaudrait mieux parler de « debtpocalypse » ou « debtmageddon ». D’autres au contraire préfèrent l’expression de « pente fiscale » (fiscal slope), car les effets de réductions massives seraient répartis sur plusieurs mois, ce qui laisserait aux politiques le temps de réagir.
Il est très possible qu’un compromis soit trouvé en décembre. Les Républicains sont sortis affaiblis de l’élection de novembre, les rhétoriques de campagne ne sont plus de saison et les sondages montrent que la plupart des Américains leur imputerait la responsabilité d’un échec.
Il reste que, par les sommes en jeu et le rôle de superpuissance joué par les Etats-Unis, la falaise fiscale représente un risque important pour l’économie mondiale.