La Base sous-marine de Bordeaux présente jusqu’au 19 mai 2013 une exposition de photographies de Samer Mohdad intitulée « Visions accomplies : les Arabes ».
Né en 1964 au Liban et de nationalité belge, Samer Mohdad parcourt le monde arabe pour en ramener des photographies qui témoignent de la vie des gens. Le Moyen Orient et le Maghreb ont vu naître les trois grandes religions monothéistes. Pendant le Moyen Âge européen, la région était à la pointe de la culture artistique, littéraire et scientifique. Elle est aujourd’hui en proie aux haines et aux guerres. Des opérations militaires et des campagnes de représailles à répétition tentent de convaincre les Arabes qu’ils sont un peuple vaincu. Les photos de Mohdad témoignent de la vitalité de ce peuple, de son acharnement à vivre, à rire et à aimer même sur des champs de ruine.
La visite de l’exposition fait passer de la lumière du Bassin à Flot de Bordeaux un jour ensoleillé d’avril à la pénombre de la base sous-marine, un gigantesque blockhaus au sein de laquelle a été aménagée une suite de salles. Les photos sont délicatement éclairées et émergent de l’obscurité. Beaucoup sont en noir et blanc, ce qui accentue le contraste entre ombre et lumière. C’est précisément ce que veut montrer le photographe : un pays obscur à force de clarté, un pays lumineux aux ombres portées. « Le Chénoua est noir de soleil » écrivait Camus dans Noces à Tipaza.
Le parcours proposé par l’exposition est envoûtant. Dans une salle, un filet de musique arabe ajoute au dépaysement. On aime ces hommes, ces femmes, ces enfants qui habitent avec grâce leur aride patrie.
Les Jeux Paralympiques de Londres constituent un succès de billetterie, d’audience télévisée et de force symbolique.
La cérémonie d’ouverture des Jeux Paralympiques le 29 août a réalisé en Grande Bretagne une pointe d’audience de 11,2 millions de spectateurs. C’est pourtant une petite chaîne privée, Channel 4, qui diffusait l’événement : sa part d’audience fut ce soir-là cinq fois celle d’un mercredi ordinaire.
Ce fut une belle cérémonie, mise en scène par Jenny Sealey et Bradley Hemmings et placée sous le signe des Lumières. Comme les philosophes du dix-huitième siècle, il nous faut apprendre à regarder. Stephan Hawking fut au centre de la scène, et on rediffusa le message préparé pour son soixante dixième anniversaire : « soyez curieux, regardez les étoiles et non le bout de vos chaussures ». On célébra Newton, qui découvrit la gravité en regardant tomber une pomme : comme elle était pertinente, cette référence à la gravité en présence d’athlètes dont le corps mutilé est si lourd, représente un si épais défi !
L’actrice handicapée Nicola Miles-Wildin était dans un fauteuil roulant suspendu dans l’espace, regardant attentivement ce qui se passait autour d’elle. Elle était Miranda, la fille du roi déchu Prospero dans la pièce de Shakespeare La Tempête, tendue vers la rédemption. Et les vers de Shakespeare résonnèrent : « O wonder ! / How many goodly creatures are there here! / How beauteous mankind is! O brave new world,/ That has such people in’t”. “O merveille ! Combien de gens de bien il y a ici ! Comme l’humanité est pleine de beauté ! O brave nouveau monde qui a de telles personnes en son sein ! » Il ne faut pas détourner les yeux et au contraire les fixer sur cette humanité souffrante, mais défiante, combattante et digne.
L’allégorie du parapluie fut omniprésente, du jeu scénique au cortège des délégations nationales : symbole de la Grande Bretagne pluvieuse, espace protégé offert à ceux que la vie a brutalisés, alvéoles qui, toutes ensemble, forment les pétales d’une gigantesque fleur.
Les Jeux Paralympiques avaient été créés par le neurologue Ludwig Guttmann dans la cour de l’hôpital de Stoke Mandeville (à Aylesbury, à 70 km au nord-ouest de Londres – et 30km de notre Watford), en parallèle des Jeux Olympiques de Londres en 1948. Il entendait redonner un sens à la vie de jeunes soldats mutilés par la guerre. Aujourd’hui aussi, beaucoup des athlètes en compétition ont combattu dans les guerres d’Irak ou d’Afghanistan. Mais ce qui n’était il y a soixante quatre ans qu’une expérimentation est devenu un événement à part entière, attirant l’intérêt et la sympathie d’un vaste public.