« Taxi Téhéran », film réalisé par un metteur en scène interdit de tourner dans son pays et empêché de la quitter, film au budget dérisoire de 32.000€, a reçu l’Ours d’Or au Festival de Berlin.
Jafar Pahani a été interdit de pratiquer son métier de metteur en scène en 2010 pour vingt ans. « Taxi Téhéran » est son troisième film clandestin. Ne pouvant filmer ni en studio ni dans la rue, il s’est imaginé en chauffeur de taxi et a installé trois micro-caméras dans sa voiture.
Le réalisateur chauffeur traverse en tous sens une Téhéran moderne, bouillonnante d’activité, semblable en tous points à des métropoles d’Europe du Sud. Même les passantes, la tête toujours couverte, affichent des tenues décontractées et une démarche décomplexée.
Pahani accueille dans son taxi toutes sortes de gens. Un passager et une passagère discutent âprement de l’opportunité ou non d’appliquer la peine de mort à de petits délinquants pour les dissuader. Une femme accompagne dans le taxi son mari victime d’un accident et se préoccupe de son héritage au cas où il décéderait. Un détaillant en DVD de films interdits utilise le taxi pour sa tournée commerciale. Une avocate des droits de l’homme est en instance de voir révoquée sa licence d’exercer. Et surtout, Hana, une ravissante gamine d’une dizaine d’années présentée comme la nièce du réalisateur, joue les cameraman et explique à son oncle ce qu’il faut censurer pour qu’un film soit acceptable.
Le taxi de Jafar est un symbole de la situation d’enfermement où il se trouve dans son pays. Mais c’est aussi un lieu où la parole est libérée, un lieu où cette parole se meut librement dans les artères de la cité.
« Taxi Téhéran » est un film de résistance à l’oppression religieuse. C’est aussi une œuvre qui témoigne, malgré des moyens extrêmement réduits, d’une grande virtuosité technique et artistique de la part de Jafar Pahani.