Arte TV a rendu récemment hommage à Umberto Eco, décédé le 19 février dernier. Au cours d’une soirée spéciale ont été diffusés successivement le film « le nom de la rose » de Jean-Jacques Annaud et un documentaire tourné en 2012 dans lequel l’écrivain, alors âgé de 80 ans, évoquait sa vie et ses passions.
Intitulé « Umberto Eco, derrière les portes », le documentaire de Teri Weln Damisch fut tourné dans la maison d’Umberto Eco près de Rimini : un ancien couvent jésuite aux 40 pièces et 40 portes.
Umberto Eco évoque son patronyme, qui se traduirait en français par « écho », un nom qui convient bien à un homme de lettres et de communication. Il fut attribué à son grand-père, un enfant trouvé, par un officier d’état-civil : un acronyme de Ex Coelis Donatus, donné par les cieux, Eco.
Dans sa maison-couvent, Umberto Eco disposait d’une bibliothèque gigantesque. Il eut le souci (et les moyens financiers) de tout conserver : les livres illustrés de son enfance, des centaines de polars (qu’il avait tous lus), les croquis qui lui avaient permis de créer « l’univers » du « nom de la rose », ses propres livres dans toutes leurs traductions, d’innombrables traités de sciences humaines.
Eco était un passionné de musique et jouait volontiers de la flûte à bec. Il avait aussi la passion de Paris, ville qui servit de scène à plusieurs de ses romans (« le pendule de Foucault », « le cimetière de Prague »…)
Une obsession qui court dans toute l’œuvre scientifique et romanesque d’Eco est celle de la fausseté. Il fut profondément influencé par son enfance dans l’Italie du fascisme triomphant. Comment des millions d’Italiens se laissèrent-ils subjuguer par l’histoire que leur racontait le dictateur Mussolini, une histoire d’épopée guerrière si éloignée de la réalité éclatée de la Péninsule et de l’identité bigarrée de la nation italienne ?
Comment le peuple allemand a-t-il cru à la fable d’un complot mondial ourdi par les « Sages de Sion » pour s’emparer du pouvoir, alors que le Times avait révélé dès 1921 que les Protocoles, publiés en 1905, étaient un faux grossier ?
Umberto Eco était un professionnel du langage, en tant que sémiologue et que romancier. Les théories du complot prospèrent à l’âge de l’Internet et des réseaux sociaux. Eco nous a donné les moyens de comprendre les processus mentaux qui, chez les peuples comme chez les individus, permettent de faire passer du faux pour du vrai.