Un divan à Tunis

« Un divan à Tunis », premier film de la franco-tunisienne Malene Labidi, est une comédie très réussie sur la Tunisie d’après le printemps arabe.

Lorsque Selma Derwish (Golshifteh Farahani) débarque à Tunis pour y monter un cabinet de psychanalyse, le dictateur Ben Ali vient d’être contraint à l’exil. « La chute brutale de la dictature, dit la réalisatrice Malene Labidi, avait plongé le pays dans une chaos et une incertitude provoquant chez certains des troubles anxieux et dépressifs liés aux interrogations sur l’avenir politique du pays, la crise économique, le spectre islamiste, le terrorisme. »

Le « marché » potentiel de la jeune psychanalyste est donc immense ! Mais il lui faut surmonter les préjugés : « nous n’avons pas besoin de cela puisque nous avons Dieu » ! Il est difficile d’imposer le vouvoiement quand on parle en français, puisqu’il est absent en arabe. Quant à la ponctualité, et à l’exigence de séances strictement limitées dans le temps, elles sont franchement contre-culturelles !

La jeune parisienne parvient pourtant à ouvrir son cabinet qui ne désemplit pas. La tenancière d’un salon de beauté, Baya (Feriel Chamari, formidable) devient sa première cliente et sa meilleure publicité. Bref tout va bien jusqu’au jour où on lui fait remarquer qu’elle n’a pas demandé l’indispensable autorisation administrative. Commence pour Salma un calvaire grandguignolesque dans les arcanes du ministère de la santé.

Le film est surplombé par la personnalité solaire de Golshifteh Farahani, jeune femme libre qui avance malgré les quolibets et les obstacles. Les personnages secondaires sont, eux aussi attachants. Celui de Naïm (Madj Mastoura), policier tiraillé entre le devoir qui lui impose de sanctionner Selma et son attirance pour cette belle femme à l’irrésistible haleine d’harissa ! Celui de sa nièce Olfa (Aïcha ben Miled), jeune étudiante révoltée prête à épouser un homosexuel de nationalité française pour fuir la Tunisie. Celui d’un imam, voisin d’immeuble, chassé de son office par des salafistes.

Un personnage à part entière est la Tunisie, raillée pour son administration inefficace, pour son machisme, pour ses pannes quotidiennes. Mais pour Selma, née au bled mais éduquée en France et ayant pratiqué son métier dans le dix-septième arrondissement de Paris, La Tunisie est le lieu où elle se sent chez elle. Son lieu d’amour.

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