Chaque année, nous passons un week-end prolongé avec un groupe d’amis. Notre rencontre 2013 s’est déroulée en Andalousie.
Le groupe se compose de quatre couples qui se sont connus il y a une dizaine d’années alors qu’ils étaient expatriés à Madrid. A tour de rôle, chaque couple prend en charge l’accueil du groupe pour un week-end et propose un programme d’activités. Nous avions eu cette responsabilité à Watford il y a deux ans. Cette fois, ce sont Elise et Claude qui nous reçoivent dans leur maison de Nerja, près de Málaga.
Ils ont prévu pour nous un programme intense et varié : flânerie dans les ravissantes rues de Nerja, randonnée dans le lit du ruisseau encaissé qui descend de la Sierra, visite de la cathédrale de Málaga et du musée Picasso, promenade parmi les formes fantasmagoriques des rochers calcaires érodés du Torcal, repas à la maison ou dans des restaurants typiques.
Au fil des heures, nous nous racontons nos vies. La joie d’un mariage ou d’une naissance, la souffrance d’un conflit familial, l’angoisse des tensions de trésorerie d’une entreprise, les soucis de santé, la perspective d’une retraite à construire, les plaisirs procurés par un livre, un film ou une chanson, tout cela percole peu à peu dans notre propre vie. Ce qui fait rire nos amis, ce qui les désole, ce qui les rend perplexes, ce qui les indigne s’installent peu à peu dans notre paysage intime. Excités par ce moment d’intense partage, conscients de la brièveté de ce temps éphémère, nous éclatons en incontrôlables fou-rires. Nous regardons ce qui nous entoure d’un regard neuf, multiple, celui de personnes différentes qui voient les choses à la lumière de leur propre expérience et de leur propre tempérament.
Ce groupe d’amis se compose de personnalités très différentes, et presque antinomiques. Ce qui le fait exister, c’est ce week-end annuel. La question se pose régulièrement d’inviter d’autres personnes, mais des objections se présentent : les affinités ou réticences des uns ou des autres, la crainte qu’un groupe de plus de huit personnes soit difficilement gérable, l’exclusion de ceux qui ne pourraient se permettre le coût du voyage et du séjour. Comme tout organisme social, notre groupe a sa frontière. Elle constitue sa limite. C’est peut-être elle qui lui permet d’atteindre une profonde vérité dans le partage de nos vies.
Photo « transhumances » : sculpture dans une rue de Málaga.