« Une robe pour Mrs Harris » (Mrs Harris goes to Paris), film réalisé par Anthony Fabian, est une agréable comédie qui brode sur l’invisibilité des personnes du dessous, dans une société de classes.
Douze années après la fin de la seconde guerre mondiale, en 1957, Ada Harris (Lesley Manville) attend encore le retour de son mari Eddie. Lorsqu’enfin elle reçoit la confirmation de sa mort au combat, elle se demande ce qu’elle peut faire de sa vie.
Ada vit dans le sous-sol d’un immeuble londonien. Pendant la journée, elle fréquente la haute société, mais comme femme de ménage. Elle est ouvertement méprisée, son salaire est considéré comme une aumône. C’est comme si elle n’existait pas.
Chez l’une de ses patronnes, elle tombe en extase devant une robe de Christian Dior. Sa décision est prise : elle économisera, jouera aux courses pour gagner un pactole, ira à Paris chez Dior, acquerra une robe. N’importe qui aurait renoncé devant les difficultés. Pas Mrs Harris.
Chez Dior, elle se heurte à l’hostilité de la directrice, Madame Colbert (Isabelle Huppert) mais le marquis de Chassagne (Lambert Wilson), impressionné par sa détermination souriante, la prend sous son aile. Elle noue amitié avec la mannequin vedette de Dior, Natacha (Alba Baptista) qui, impressionnée par la lecture de Sartre, tente de donner sens à son existence.
Télérama a publié une critique féroce du film d’Anthony Fabian : « ce cinéma de grand-maman réussit deux exploits. Battre le record de mièvrerie accumulée en deux heures de projection (mais quatre en durée ressentie). Et, par sa reconstitution ridiculement carte postale de la France de l’après-guerre, faire passer la série Emily in Paris pour un film des frères Dardenne. »
J’ai passé un agréable moment avec ce film, en avion dans un vol transocéanique. Il est vrai qu’il propose au spectateur des cartes postales : le Paris brillant contre le Londres crapoteux ; les ouvriers grévistes contre les patrons bornés. Mais je ne crois pas que le metteur en scène se soit attendu à ce que les spectateurs aient pris cela au premier degré. Je revendique le droit à la carte postale !
Et le défilé de mode auquel assiste Ada, et nous avec elle, est d’une grande beauté. Mrs Harris a trouvé l’élixir de la visibilité.