Dans « Vermiglio ou la mariée des montagnes », la réalisatrice Maura Delpero fait revivre un village rural de montagne de la région de Trente en 1944-1945.
Ce village est Vermiglio, où est né son père. Le scénario est inspiré de l’histoire de sa famille. C’est une famille nombreuse. Le père, Cesare (Rommaso Ragno) est l’unique instituteur de l’école. La mère, Adele (Roberta Rovelli) met au monde un enfant chaque année. Certains meurent avant d’avoir grandi.
Les temps sont durs. Au petit-déjeuner, les enfants reçoivent chacun une louche du lait que l’on a trait la veille. Un jour arrive au village un cousin, Attilio. Il était militaire et a déserté. Il est accompagné d’un camarade de régiment, Pietro (Giuseppe De Domenico). Pietro, qui est Sicilien, ne parle pas le dialecte de la région. Il est aussi rendu muet par le poids des souvenirs des champs de bataille.
C’est par les regards que Pietrol communique avec Lucia (Martina Scrinzi), l’une des aînées de la famille de l’instituteur. Les corps se touchent. L’hiver touche à sa fin. Au printemps, Lucia et Pietro se marient. Un enfant va naître. Mais alors que le village remercie la Vierge des neiges pour la fin de la guerre, la paix retrouvée signifie que Pietro doit rentrer en Sicile rassurer ses proches. Il ne reviendra pas.
Le film de Maura Delpero est captivant par la densité de ses personnages. Le père, Cesare, vit pour le savoir et pour la musique. À sa femme qui lui reproche d’acheter des disques de Chopin et Vivaldi alors qu’on ne mange pas à sa faim, il parle de nourriture spirituelle. C’est un homme juste. Il n’hésite pas à refuser le diplôme de fin d’études à son propre fils parce qu’il n’a pas le niveau, et à le donner à des enfants du village même plus jeunes. Il le fait en humiliant son fils. L’empathie lui est étrangère.
Lucia sait ce qu’elle veut, elle sait qu’elle aime Pietro, qu’il est l’homme de sa vie. Sa disparition et le défi d’élever seule, sans homme à elle, un bébé, semble insurmontable. Mais elle va de l’avant. Elle voyage en Sicile pour comprendre ce qui s’est passé. Elle pense au suicide, mais choisit de vivre.
La cadette de Lucia, Ada (Rachele Potrich) est torturée par son corps, qu’elle voit source de péché. C’est elle qui trouvera le moyen de sauver Lucia, de lui permettre de garder son enfant tout en gagnant sa vie.
Les paysages, filmés au long des quatre saisons, sont superbes. Le spectateur sort de ce film méditatif comme envoûté. « Vermiglio » a reçu l’Ours d’Argent (prix du jury) à la Mostra de Venise.