Pour rendre hommage au réalisateur Miloš Forman, récemment disparu, Arte TV a diffusé le film « Vol au-dessus d’un nid de coucou » (1976).
Pour échapper à la prison, où l’a conduit un viol sur mineure, Randle McMurphy (Jack Nicholson) se fait passer pour fou. L’équipe médicale de l’hôpital psychiatrique où il a été enfermé est chargé de poser un diagnostic : est-il un simulateur ?
Randle ne tarde pas à jouer un rôle le leader. Doté d’un bas-goût peu commun, il galvanise ses compagnons de chambrée par un championnat de base-ball sur un écran de télévision muet, puisqu’ils n’ont pas été autorisé à l’allumer. Il anime un match de basket-ball surréaliste où les malades l’emportent sur les soignants. Il organise une partie de pêche en mer en faisant évader, pour une demi-journée, ses compagnons.
Randle se heurte à l’infirmière-chef Mildred Ratched, une belle femme qui sait être charmante et qui a le malheur de croire en son métier : elle est convaincue de faire le bien des patients en toutes circonstances, même et surtout en recourant à la contrainte. Il a décidé de lui pourrir la vie. Il s’évaderait ensuite avec un Indo-américain géant, Bromden (Will Sampson), dont il a gagné l’amitié. Mais l’institution dispose de deux armes redoutables : l’électrochoc et, plus terrible encore, la lobotomie.
La projection de ce film magnifique était suivie d’un documentaire d’Antoine de Gaudemar, « il était une fois, Vol au-dessus d’un nid de coucou », qui raconte sa genèse : comment Kirk Douglas puis son fils Michael avaient voulu produire ce film. Comment Douglas avait repéré en Tchécoslovaquie un jeune metteur en scène, Miloš Forman. Comment il avait été difficile de trouver un lieu pour tourner le film, puisque le metteur en scène exigeait des décors naturels.
Comment Dean Brooks, le directeur de l’hôpital psychiatrique de Salem, dans l’Oregon, avait relevé le défi et accepté de jouer le jeu au point d’accepter le rôle du directeur de l’institut où McMurphy est hospitalisé. Comment acteurs et pensionnaires de l’institut, mêlés, vécurent une période de tournage d’une intensité exceptionnelle.
« Vol au-dessus d’un nid de coucou », dérivé d’un roman contestataire de Ken Kesey, connut un succès immédiat en salles. Il rafla cinq oscars, meilleur film, meilleur scénario, meilleur acteur, meilleure actrice. Il contribua à faire évoluer la perception de la maladie mentale aux États-Unis et dans le monde, et à faire reculer des traitements violents et destructeurs de la personnalité des patients.
Miloš Forman rappelait volontiers que ce film avait pour lui, qui avait fui la Tchécoslovaquie après l’écrasement du Printemps de Prague en 1968, une signification particulière. Les dirigeants de l’Union Soviétique affirmaient qu’ils ne détenaient pas de prisonniers politiques. Et pour cause : les opposants au régime étaient considérés comme fous et internés. « Pour moi ce film, disait Forman, c’était la vraie vie : le Parti Communiste était mon infirmière en chef. »
« Vol au-dessus d’un nid de coucou » ne fait pas seulement le procès de la psychiatrie dans les années 1970. Il propose aussi une fable qui accuse les institutions répressives, surtout quand elles prétendent imposer par la force leur vérités à ceux qui leur sont assujettis.