ActualitéTélévision3 mai 20111Noces Royales

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Dans The Guardian du 30 Avril, Martin Rowson livre une délicieuse interprétation du mariage entre le Prince William et Kate Middleton, célébré la veille à Westminster devant un million de spectateurs à Londres, vingt trois millions de téléspectateurs en Grande Bretagne et plusieurs centaines de millions dans le monde.

« Ne regardez pas en bas ! » exhorte le dessin. En bas, la terre est un volcan en effervescence. Les participants à la noce s’avancent sur une passerelle suspendue dans un ciel irréel. On reconnait les jeunes mariés, la Reine et la famille royale, l’horrible petite demoiselle d’honneur boudeuse, l’Archevêque de Cantorbéry, un émir, David Cameron et George Osborne.

La particularité de cette passerelle, c’est qu’elle est constituée de langues entremêlées. A droite du dessin, on voit les commentateurs vedettes de la télévision, postés devant une forêt d’objectifs. C’est à leurs langues qu’est amarrée la passerelle.

Puissance de la caricature ! En Grande Bretagne, les noces royales ont été vécues dans la joie : joie d’un long week-end de trois jours allongé d’une journée pour l’occasion ; joie d’un cérémonial parfaitement orchestré dans ses moindres détails ; joie des vêtements somptueux, des fanfares, des couleurs, des carrosses ; joie trouble du jeu des célébrités et des stars. Ce que Martin Rowson nous dit, c’est qu’il s’agit d’un spectacle, conçu et réalisé par et pour la télévision. Ce spectacle parle aux gens parce qu’il s’enracine dans une tradition qui résonne dans leur tendre enfance, parce qu’un mariage de jeunes qui semblent s’aimer d’amour est émouvant, parce qu’il fait rêver d’une autre vie. En ce sens, les noces royales sont connectées avec la vie des gens. Mais elles sont d’abord et avant tout une production médiatique.

Illustration : The Guardian, caricature de Martine Rowson, The Guardian, 30 avril 2011.

One comment

  • elisabeth

    9 mai 2011 at 22h58

    Une production médiatique, certes, mais dont le retentissement dépasse la joie des Britanniques (J’ai regardé le mariage sur CNN, Margot aussi, et bien d’autres encore dans des milieux pourtant peu portés sur la télévision). Pourquoi ? Parce que les cérémonies consensuelles, dans notre Occident largement irréligieux, sont devenues très rares (je n’ai pas regardé la béatification — trop contestable — de Jean-Paul II, tu n’en parles pas dans ton blog, d’ailleurs…). Or elles remplissent une fonction d’unification sociale autour de figures largement fantasmées, comme peut l’être ici le jeune couple princier, essentielle aux sociétés (ne serait-ce pas le sport qui remplirait cette fonction aujourd’hui, mais sans le consensus, car le jeu suppose un gagnant et un perdant, avec toutes les rivalités parfois violentes que cela comporte ?).
    Sans doute d’ailleurs les dieux de l’antiquité grecque ou latine, et le Dieu des religions monothéistes (avec ou sans ses saints, mais c’est mieux avec pour l’appropriation par chaque paroisse de son saint local) ont prospéré d’abord comme éléments de cohésion sociale. Le mariage royal révèle bien que la dimension spirituelle des religions n’est collectivement pas la plus importante (les commentateurs se sont plus intéressés à la robe de la mariée qu’à la théologie du mariage chrétien…). En revanche, une telle cérémonie et son incroyable audience médiatique montre que nous sommes tous collectivement en manque de dieux et de déesses (de saints et de saintes) capables de nous rassembler dans de grands moments de fête consensuelle.

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