CinémaItalie14 mars 20170Un paese di Calabria

Dans “Un paese di Calabria”, Shu Aiello et Catherine Catella racontent la renaissance d’un bourg de Calabre, Riace, grâce aux immigrants.

Riace, dans la province de Reggio di Calabria, est un bourg serré sur un escarpement de colline, à bonne distance de cette mer dont venaient les agresseurs. Il a été longtemps une terre d’émigration massive. Dans le film, une voix off raconte la fuite d’une femme et de son mari de la misère vers la France, vers n’importe où.

L’exode de la population a laissé cette terre exsangue. En 1998, le bourg comptait 900 habitants, principalement des vieux. Et c’est cette année-là que se produisit un événement miraculeux : l’arrivée d’un bateau de réfugiés kurdes s’échoua sur la côte. La population leur prêta secours, les accueillit. L’idée germa de leur offrir des maisons abandonnées, à charge pour eux de les retaper. La terre d’émigration se mit à recevoir des immigrés.

Aujourd’hui, le bourg vit de l’immigration. Un centre d’accueil de réfugiés de 600 places y a été organisé, financé par l’Union Européenne. Il crée de l’emploi. Grâce à lui, commerces et écoles revivent. La population a plus que doublé en vingt ans. Elle atteint aujourd’hui 2 100 habitants.

Le maire, Domenico Lucano, est l’artisan de ce renouveau. Son meilleur allié est le curé. Dans son église, il accueille catholiques et croyants d’autres confessions. Au micro, un immigrant récite des prières musulmanes. Lorsque les saints locaux, Côme et Damien, sont portés en procession dans les rues étroites de Riace, les réjouissances s’adressent aux accueillants comme aux accueillis. La légende veut que Côme et Damien soient venus à Riace en barque de Syrie…

Aux élections municipales, l’équipe sortante, porteuse du projet d’accueil des immigrants, est réélue de peu. On sent bien qu’une partie de la population y est hostile. D’autre part, plane sur Riace l’ombre de la « mauvaise vie », de la N’Dranghetta.

Les réalisateurs ne versent pas dans l’angélisme, mais leur registre est plutôt celui de l’émotion : celle des naufragés, lorsqu’ils repensent à la tragédie vécue en mer et aux noyés ; celle de la marraine calabraise d’un enfant africain, ou de l’institutrice pénétrée de sa mission. Un autre film serait à réaliser, qui montrerait l’effet économique de l’ouverture de la pompe à finances européenne, les changements dans l’agriculture, les progrès de l’italianisation au détriment du dialecte calabrais.

Il reste que « un paese di Calabria » est un film touchant et juste, qui plaide efficacement pour l’ouverture des cœurs et des esprits quand l’heure est plutôt à la construction de murs et de barrières.

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