J’ai le privilège d’accompagner vers sa fin de vie un vieil ami. Je lui rends visite chaque semaine dans l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes où il a une chambre depuis quelques mois.
Il se sent enfermé, non pas tant par le règlement de l’établissement que par sa propre dépendance, le déclin de ses forces, la confusion de son esprit.J’ai rédigé le texte ci-dessous alors que j’attendais, au parloir d’une maison d’arrêt, un détenu que je venais visiter. Une autre forme d’enfermement.
À la dérive
Vers l’autre rive
Laissant loin enfouis les bons souvenirs
L’enfance pied-noir
L’épopée de la deuxième DB
La femme aimée
Un pastis avec des amis à l’ombre d’une caravane
Une clé de douze
Un moteur de Land Rover
La maison au bord d’un lac
La douleur de ne plus se souvenir
L’effort désespéré et vain pour se rappeler
Le nom d’un proche
La question qu’il fallait poser
La date d’un rendez-vous passé ou à venir
Et qui ne viendra peut-être jamais
Brume, confusion, noyade
Le cœur amer,
Le corps en souffrance
Peur et honte de se souiller
Les jambes ne portent plus
Porter plainte
Contre ceux qui maintiennent la vie
Cette vie qui n’en finit pas de finir.
Beau, ton texte, Xavier, poignant.
Et angoissant
très beau…