Cinéma23 février 20110La Nuit Américaine

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Deux cinémas londoniens programment actuellement « La Nuit Américaine » de François Truffaut 1973).

Nous nous rendons généralement au cinéma pour voir des nouveautés. Nous regardons les films anciens en DVD ou à la télévision, et « La Nuit Américaine » est certainement l’un des films les plus rediffusés sur les chaînes françaises. C’est donc avec un sentiment étrange que nous prenons place dans une salle du Odeon Panton Street Cinema de Londres pour voir ce film vieux de près de quarante ans avec un regard neuf.

La Nuit Américaine, Day for Night en anglais, est un film sur le tournage d’un film, « je vous présente Paméla ». Le personnage principal est à la fois le réalisateur du film et celui du film sur le film, François Truffaut lui-même.

Il nous parle du travail du réalisateur, soumis à la pression du producteur, menacé par toutes sortes d’impondérables, comme la défection d’un acteur vedette, accablé par mille questions de détail qui ensemble feront le succès ou l’échec du film, travaillant la nuit à réécrire le scénario.

Il nous montre le tournage selon un planning qui ne doit rien à la progression de l’intrigue une fois le film monté, mais tout à la disponibilité des comédiens, de l’équipe technique et du matériel. Il insiste sur la répétition jusqu’à l’épuisement de la même scène. « Cette prise est parfaite » dit l’opérateur ; « recommençons ! » rétorque le réalisateur ».

Il nous fait voir les trucages du cinéma, les façades en carton plâtre, la pluie émise par des tuyaux percés, la neige en mousse, les figurants sortant d’une station de métro virtuelle selon des ordres donnés par haut parleur. Truffaut exprime dans le film la conviction que l’époque des films tournés en studio s’achevait avec lui. L’avenir lui a donné tort.

La Nuit Américaine constitue aussi un hommage au métier des comédiens. Les personnages principaux de « je vous présente Paméla » sont fragiles. Julie (Jacqueline Bisset) a quitté le précédent tournage pour cause de dépression ; Alphonse (Jean-Pierre Léaud) est un être immature dont les relations féminines tournent à la catastrophe ; Séverine est alcoolique, Alexandre mourra pendant le tournage d’un accident  de voiture. Lâché par sa petite amie du moment, Alphonse menace de tout laisser tomber. « Je sais, il y a la vie privée, mais la vie privée, elle est boiteuse pour tout le monde, lui dit Ferrand / Truffaut. Les films sont plus harmonieux que la vie, Alphonse. Il n’y a pas d’embouteillages dans les films, il n’y a pas de temps morts. Les films avancent comme des trains, tu comprends ? Comme des trains dans la nuit. Les gens comme toi, comme moi, tu le sais bien, on est fait pour être heureux dans le travail de cinéma ».

Parfois, la vie privée et le film se rejoignent. Trahie par Alphonse, Julie dit son amertume et son désespoir à Ferrand. Le lendemain, la réplique est dans la bouche de Paméla, le personnage qu’elle joue dans le film.

Photo du film « La Nuit Américaine » : Jean-Pierre Léaud, Jacqueline Bisset et François Truffaut.

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