Assange ou démon ?

Julain Assange au balcon de l'ambassade d'Equateur à Londres. Photo The Guardian

La spectaculaire apparition de Julian Assange au balcon de l’ambassade d’Equateur à Londres, où il est réfugié, a suscité l’enthousiasme de ses partisans.

 Parmi ses supporteurs, il faut mentionner Adolfo Pérez Escrivel qui, depuis son Prix Nobel de la Paix en 1980, se pense investi d’un magistère moral planétaire. Citons la première partie de son texte :

 « Depuis l’Argentine, nous suivons avec beaucoup de préoccupation les récents évènements internationaux au sujet de la décision souveraine de la République d’Equateur d’accorder l’asile diplomatique à Julian Assange dans le cadre du Droit International.

 Le Gouvernement de la République d’Equateur a exprimé les raisons qui l’ont amené à prendre cette décision ; parmi ces raisons, la préoccupation pour la vie même de Julian Assange qui est poursuivi politiquement pour avoir diffusé une information très grave qui a mis en évidence les actions criminelles des Etats-Unis dans les Guerre d’Afghanistan et d’Irak et les actions déjà connues d’intromission à travers ses ambassades dans les affaires intérieures des autres pays. La crainte pour la vie d’Assange est justifiée car déjà aux Etats-Unis on parle d’une éventuelle mise en jugement grâce à la Loi sur l’Espionnage qui inclut la peine de mort. »

 D’autres zélateurs tentent d’expliquer pourquoi Assange est fondé à se soustraire à la justice suédoise qui a demandé son extradition à la suite de la plainte de deux femmes pour viol. Ainsi, le député britannique George Galloway nie que les faits reprochés à Assange, même s’ils étaient avérés, puissent être qualifiés de viol : « certains croient que quand vous allez au lit avec quelqu’un, retirez vos vêtements, que vous faites l’amour avec elle et que vous vous endormez, vous êtes dans un jeu sexuel avec elle. Cela peut-être une mauvaise manière de ne pas lui avoir tapé sur l’épaule et lui avoir dit « est-ce que ça te dérange si je recommence ? » Cela peut relever d’un code de conduite sexuelle sordide, mais de quelque manière qu’on le qualifie, ce n’est pas un viol, sauf à priver le mot viol de sens. »

 La position de Galloway, qui dénie toute compétence à la justice suédoise, a le mérite de remettre au centre de l’affaire le viol présumé, et non Wikileaks. Il est bon en effet de rappeler :

 Que Julian Assange n’est pas l’objet d’une procédure judiciaire aux Etats-Unis, et encore moins d’une procédure d’extradition ;

 Que la Suède est un Etat de droit, dans laquelle la justice s’efforce de faire son travail avec impartialité ;

 Que deux femmes estiment avoir subi un préjudice et attendent réparation.

 La stratégie de Julian Assange est de se faire passer pour victime en espérant ainsi ne pas avoir à répondre de l’accusation d’agression. Il prétend ne pas comparaître devant la justice suédoise au nom de l’injustice faite à Wikileaks. Ce positionnement de donneur de leçons morales est pour le moins éthiquement douteux.

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