Liberté, j’écris ton nom

Le célèbre poème écrit en 1942 par Paul Éluard, « liberté, j’écris ton nom », prend pour moi une signification particulière depuis que je visite des personnes détenues.

 J’apprends à savourer chacun des moments de ma liberté en prenant conscience de ce qu’ils pourraient ne pas exister. Il y a certes d’autre privations de liberté que celles de la maison d’arrêt : la grande pauvreté, la grave maladie ou encore la dépression. Mais lors de mes visites hebdomadaires à des prisonniers, je mesure ma chance de vivre libre.

J’ai choisi deux strophes du poème qui me parlent particulièrement.

 Sur les merveilles des nuits
Sur le pain blanc des journées
Sur les saisons fiancées
J’écris ton nom

 Participer au mariage de sa fille et s’enivrer du plaisir de retrouver famille et amis. Pédaler sous une pinède au soleil couchant, lorsque les ombres de septembre portent loin et les senteurs s’expriment. Acheter une pâtisserie pour le dessert d’un déjeuner partagé entre amis. Choisir de passer la soirée au cinéma ou au concert. Sur les merveilles des nuits, sur le pain blanc des journées, sur les saisons fiancées, j’écris ton nom, liberté !

 Sur les formes scintillantes
Sur les cloches des couleurs
Sur la vérité physique
J’écris ton nom

 Observer dans le tram une jeune femme éclatante de féminité, et cette autre aux yeux gris si profonds. Assister à une aurore éclatante sur le lac en face de notre maison. Apprendre à jouer au piano et s’émerveiller des harmonies. Contempler le sommeil d’un chaton ronronnant. Laisser les gouttes de pluie dégouliner sur son visage. Avoir le projet de reprendre des études et le réaliser. Sur les formes scintillantes, sur les cloches des couleurs, sur la vérité physique, j’écris ton nom, liberté !

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